Comment imprimait-on avant l'invention de l'imprimerie ?
C'est une question qu'on ne se pose pas assez souvent (et pourtant, elle mérite bien quelques minutes de notre attention). Avant que Gutenberg vienne chambouler le Moyen Âge avec ses caractères mobiles, comment faisait-on pour reproduire des textes ? Spoiler : on prenait son mal en patience. Beaucoup de patience.
INNOVATIONS HISTORIQUESLA FRANCE DU MOYEN-ÂGEIMPRIMERIE AU MOYEN-ÂGE
Loïc
5/15/20254 min read


Les ancêtres de l'imprimé : tablettes, papyrus et parchemins
Avant l'apparition du livre tel qu'on le connaît aujourd'hui, les civilisations antiques utilisaient plusieurs supports d'écriture :
Les tablettes d'argile étaient courantes chez les Assyriens. On y gravait les textes à l'aide d'un stylet, dans une écriture cunéiforme (signes graphiques en forme de coins, ou de clous)
Les Égyptiens utilisaient des rouleaux de papyrus, un matériau léger mais fragile, parfait pour les textes religieux et administratifs.
Les Romains et les Grecs employaient quant à eux des parchemins ou des tablettes de cire pour consigner lois, correspondances, et même de la comptabilité. Un peu plus solide cette fois-ci !
Et la Chine, me direz-vous ? C'est là-bas que la xylographie fait son apparition dès le VIIe siècle : on grave une planche en bois en relief, on l'encre, on y applique une feuille... et hop, une copie. Simple, mais pas encore révolutionnaire. Le vrai début de l'imprimerie au final...
Le Moyen Âge : l'ère des moines (et de la calligraphie de compétition)
Passons maintenant à ce qui nous intéresse vraiment : comment faisaient les moines pour recopier les livres, et combien de temps cela prenait ?
Des scribes mais pas toujours lettrés
Les moines copistes étaient responsables de la reproduction des textes. Ironiquement, certains ne savaient même pas lire. Mais ce n'était pas un problème : justement, leur ignorance leur évitait d'anticiper les mots à venir, ce qui les obligeait à se concentrer sur chaque lettre, dessinée avec une précision d'orfèvre.
D'autant plus que les livres étaient rédigés en latin, langue qui n'était pas parlé par la plupart. Lorsque Gutenberg révolutionna le Moyen-Âge avec l'imprimerie, il décidera d'imprimer en ajoutant des points et des accents au mots, pour que les textes soient compréhensibles par le plus grand nombre, contrairement à l'écriture latine, sans accents ni points.
On estime qu'un moine pouvait produire environ 5 pages par jour. Autant dire qu'écrire une bible prenait plusieurs années.
Les outils et les supports
Les plumes : généralement des plumes d'oie, de cygne ou de poule, taillées au canivet (un mini-couteau). Le choix de la plume dépendait de la taille des lettres : grandes pour les titres, plus fines pour les corps de texte.
Les encres : à base de suie, de plomb ou de composés naturels.
Le support : du parchemin (peau de mouton), ou du vélin (veau mort-né), plus blanc et plus fin pour les textes prestigieux.
Les astuces optiques : avant les lunettes, on utilisait des bonbonnes d'eau en verre comme loupes. Une vrai technique de la galère, mais redoutable !
Les ardoises de cire : utiles pour les brouillons, souvent utilisées par les commerçants ou architectes. L'avantage est qu'il était possible de gommer son écriture.
Ne pas boire avant d'écrire (sérieux)
Oui, c'est véridique : les moines évitaient de boire avant de copier, pour ne pas trembler. Et on peut les comprendre quand on voit la finesse de leur trait.
Les informations citées ici proviennent de cette vidéo, très intéressante que je vous invite à regarder (ci-dessous) :
Calligraphie : quand chaque lettre devient art
Carolingienne vs Gothique
L'écriture carolingienne (VIIIe-IXe siècle, impulsée par Charlemagne) est lisible, aérée, avec des lettres bien distinctes. Elle visait la clarté et la standardisation des textes religieux et administratifs.
L'écriture gothique (XIIe-XVe siècle) est plus compacte, anguleuse, ce qui permettait d'économiser de la place (et donc du parchemin, qui coûte cher).
Parfois, on trouve les deux styles mêlés dans une même page, un même mot... voire une même lettre. De quoi rendre fous les lecteurs modernes.
Les copistes utilisaient des repères : par exemple, 5 points de plume servaient à mesurer la hauteur des lettres. Une manière d'assurer une certaine harmonie dans la page.
Crédit photo : jmwk, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons
Le codex : le livre avant l'imprimerie
Le codex (livre relié avec des pages qu'on tourne) remplace peu à peu le rouleau antique, notamment à partir du début du christianisme. Ce format permet de lire par chapitre, de facilement se repérer, et de gagner de la place. Les livres sont cousus, reliés, parfois avec des couvertures rigides ornées.
Et que contenait-on dans ces livres ?
Des textes religieux (bien sûr, priorité au salut de l'âme)
Des romans de chevalerie, réservés à la noblesse
Avant l'imprimerie, environ 50 000 codex circulaient en Europe. Après Gutenberg ? Plus de 200 000. Comme quoi, la technique, ça aide.
Des pages, de la peinture, des marges
Les moines laissaient de grandes marges pour que les enlumineurs puissent ajouter leurs illustrations :
Motifs religieux, chevaleresques ou floraux
Peintures réalisées avec du plomb, des pigments naturels, parfois de l'or
C'était de la véritable calligraphie d'art, réservée au clergé puis à la noblesse (dès le XVIIIe siècle). Chaque livre était unique.
Par ailleurs, les premiers livres imprimés en Europe (La Bible de Gutenberg) ont aussi été pensé pour pouvoir être sublimés avec des enluminures faites à la main. La transition s'est donc faite petit à petit.
En bref : avant l'imprimerie, copier c'était toute une affaire
Entre les outils, les supports, les styles d'écriture et les techniques de reliure, l'écriture manuscrite était un métier d'art à part entière. Long, coûteux, mais incroyablement précis.
Quand Gutenberg décide d'imprimer des textes avec ponctuation, accents, et en langue compréhensible par le plus grand nombre, il ne fait pas qu'inventer une machine : il démocratise le savoir.
Et nous, pendant ce temps-là, on se plaint de devoir lire un PDF un peu flou...



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